Article d’Icaros d’Essentiel News
La «directive Hannibal» est une politique instaurée par l’armée israélienne en 1986 qui, pour simplifier, repose sur le principe suivant: lorsqu’un otage israélien est sur le point d’être capturé par l’ennemi, il convient de le tuer pour empêcher sa capture.
Autrement dit, dans la hiérarchie des priorités de l’armée israélienne, la mort d’un otage est considérée comme un moindre mal par rapport au casse-tête tactique et politique que représente sa libération.
La directive Hannibal a été appliquée de façon avérée et admise lors de plusieurs incidents notables depuis son introduction en 1986; aussi bien contre des soldats que des civils israéliens.
Bien que la directive ait été officiellement abolie en 2016, le ministre israélien de la défense en poste au moment de l’attaque du 7 octobre 2023, Yoav Gallant, vient d’admettre avoir invoqué la directive Hannibal ce jour-là.
Le journal israélien Haaretz l’avait déjà révélé l’année dernière, sans toutefois fournir de preuve:
Ce n’était pas le premier ordre donné par la division dans le but de déjouer un enlèvement, même au détriment de la vie des personnes kidnappées, une procédure connue dans l’armée sous le nom de «directive Hannibal».
Les documents obtenus par Haaretz, ainsi que les témoignages de soldats, d’officiers de niveau intermédiaire et d’officiers supérieurs des FDI, révèlent une multitude d’ordres et de procédures établis par la division de Gaza, le commandement sud et l’état-major général des FDI jusqu’aux heures de l’après-midi de ce jour-là, montrant à quel point cette procédure était répandue, dès les premières heures qui ont suivi l’attaque et en divers points le long de la frontière.
Ce qui apparaît donc aujourd’hui est une image plus nuancée de la propagande d’atrocité que les canaux Hasbara mettent en œuvre depuis presque un an et demi. Depuis le 5 février 2024 pourtant, le débat est clos en Israël; le fait de douter de la narration officielle des évènements du 7 octobre y est depuis un an passible de prison.
Pourtant, c’est le ministre de la défense de l’époque qui le confirme désormais: il se trouve que le 7 octobre, l’armée israélienne a elle-même bel et bien tué une partie des israéliens dont elle avait initialement présenté le Hamas comme bourreau.
Propagande d’atrocité
Ces aveux récents de Yoav Gallant ne représentent pas le premier coup porté à la propagande d’atrocité mise en œuvre depuis le 7 octobre.
Immédiatement après les attaques, les médias et de prétendus témoins de l’organisation caritative «Zaka» avaient affirmé que le Hamas s’était livré à des exactions sexuelles. Or six mois après les faits allégués, le monde a appris que certaines histoires étaient entièrement fausses.
On a également découvert que les 13 personnes calcinées dans leur maison à Be’eri, un épisode initialement présenté comme symbolisant la barbarie du Hamas, l’ont en fait été par les tirs de tanks israéliens (une révélation par suite confirmée par le gouvernement israélien).
De la même façon, la légende des «40 bébés décapités» par le Hamas a été inventée de toutes pièces, bien que cet épisode imaginaire continue d’être cité par des politiciens israéliens pour justifier leurs exactions à Gaza.
Massacre de Nova
Aux portes de la prison à ciel ouvert qu’était Gaza, se déroulait le 7 octobre 2023 un festival musical dénommé «Nova music festival». C’est là que les évènements de ce jour ont fait le plus de victimes.
Dès le début, les observateurs les plus attentifs avaient fait remarquer que la scène de totale dévastation retrouvée après l’attaque ne pouvait être le fait d’assaillants armés d’armes légères; au contraire, des hélicoptères de combat devaient avoir été à l’origine de la plupart des morts.
Cette position était à l’époque extrêmement controversée, et ardemment niée, dans la mesure où le gouvernement israélien se trouvait en pleine campagne internationale de sensibilisation à la barbarie du Hamas, et à sa propre vertu.
Pourtant, une fois encore, l’implication essentielle de l’armée israélienne dans les décès de Nova a été par la suite démontrée, sans grande fanfare toutefois.
Extrapolations hypothétiques
En admettant que toute la vérité ne soit pas encore connue sur ce qui s’est passé le 7 octobre, et en extrapolant à partir de la vérité déjà dévoilée, on arrive à une interprétation plus plausible de l’étonnant mystère que constitue l’apparente apathie de l’armée israélienne ce jour-là.
S’il venait un jour à être démontré que le gouvernement a laissé faire – voire aurait été complice de – ces attaques, cela s’inscrirait dans une longue continuité de révélations du même ordre, dans ce pays et ailleurs.
Depuis l’incident du golfe de Tonkin, qui a justifié l’entrée en guerre des États-Unis au Vietnam, et dont on sait maintenant qu’elle a été inventée de toutes pièces, en passant par l’affaire Lavon et l’attaque contre le USS Liberty, et jusqu’à l’invraisemblable théorie du complot promulguée par le gouvernement américain au sujet des pilotes acrobatiques du 11 septembre et de leurs passeports miraculeux, on sait les États capables de commettre, d’exagérer ou d’inventer des crimes dans le seul but de justifier leur propre agression militaire.
Certes on a une lanceuse d’alerte israélienne, Cecily Routman, qui affirme savoir que l’armée de son pays a délibérément laissé se dérouler pendant sept heures l’attaque du 7 octobre avant d’intervenir.
On a aussi Josep Borell, alors vice-président de la Commission européenne et Haut représentant de l’Union pour les affaires étrangères et la politique de sécurité, qui a révélé qu’Israël avait financé et créé le Hamas; un fait qui relève d’ailleurs du secret de polichinelle assez largement admis par les principaux intéressés.
À ce jour toutefois l’exacte implication du gouvernement israélien dans les attaques du 7 octobre n’est pas connue, comme on ne connaît pas le détail de l’implication présumée du gouvernement et des services secrets américains dans les attaques du 11 septembre 2001.
Israël et le sacrifice d’innocents
L’exemple de la «directive Hannibal», appliquée depuis 1986 et dont le dernier cas date du 7 octobre, ne représente que la partie émergée de l’iceberg. Des responsables sionistes ont, avant même la création de leur Etat en 1948, rarement répugné à risquer la vie de Juifs innocents (sans même parler de leurs adversaires).
L’exemple historique le plus connu est certainement celui de l’accord Haavara; en 1933, alors que l’Allemagne était confrontée à un boycott mondial, la Fédération sioniste d’Allemagne signe un accord peu connu avec les nazis.
À l’époque, les Juifs allemands étaient contraints de quitter l’Allemagne en grand nombre. Les pères fondateurs du futur Etat d’Israël, cherchant à peupler la Palestine à leur façon, ont favorisé cette politique en convenant avec les nazis que les Juifs ainsi expulsés pourraient récupérer leurs biens confisqués, en les convertissant en produits industriels allemands, et seulement à leur arrivée en Palestine.
Selon les historiens, cela a permis aux nazis de contourner le boycott, et a contribué avant la guerre à la reconstruction industrielle de l’Allemagne.
Le livre 51 Documents de Lenni Brenner étaye ces éléments, et produit beaucoup d’autres preuves de la collaboration entre l’Allemagne nazie et les pères fondateurs de l’Etat israélien. Ce sont des civils, notamment juifs et européens, dont on s’est servi comme pions d’une ambition coloniale.
En conclusion
Le «brouillard de la guerre» se dissipant quelque peu, on commence à discerner un faisceau de vérités nouvelles sur les évènements du 7 octobre 2023 au Proche-Orient. On s’aperçoit qu’il s’inscrit dans une certaine continuité historique.
Les médias de masse sont passés à autre chose; en ce moment il s’agit pour eux de discuter, en feignant une indignation de façade, si déporter ou non les survivants de la bande de Gaza.
Chez Essentiel, on propose au contraire un document rare: sorti en 2017, intitulé «Theodor Herzl and the anti-semitic side of Zionism» (Theodor Herzl et la dimension antisémite du sionisme), ce documentaire israélien avait presque disparu d’Internet (ci-dessous en hébreu sous-titré en anglais).
Très intéressant.
Deux questions/remarques :
Il est important de savoir que sur le plan étymologique le mot “extermination” veut dire techniquement, mettre à l’EXtérieur des frontières. Dans un premier temps, le régime nazi se préoccupait d'”ex-terminer” les Juifs en les mettant à l’extérieur des frontières d’une Allemagne dont les frontières étaient… floues dans les têtes. (Relation entre le mot “ex-terminer” et “dé-porter” ? au moment où “extermination” ne veut plus dire mettre à l’extérieur des frontières nationales, mais mettre à l’extérieur des frontières du vivant…)
Deuxièmement, ça m’intéresse beaucoup d’apprendre que cette pratique israélienne s’appelle directive “Hannibal”, car pour la continuité historique, c’est peut-être important de remonter jusqu’à… Hannibal/Carthage pour comprendre. Me revient en mémoire la phrase image d’Epinal de Cicéron comme quoi il fallait que Carthage soit absolument détruit lors des guerres puniques. Cette destruction totale mobilise des fantasmes puissants dans nos têtes.
C’était une pratique courante dans l’Antiquité de proposer aux dirigeants politiques, avant un combat/siège, de se rendre, avec en retour la garantie que la population civile serait épargnée, mais si les dirigeants refusaient de se rendre, l’armée conquérante pouvait mettre totalement à sac les lieux, allant jusqu’à… exterminer, en mettant à mort, TOUS LES CIVILS, et même leur bétail (voir les récits de combat des Hébreux de l’Ancien Testament que pour ma part, je ne prends pas pour de la mythologie…).
Donc… d’où vient le “Hannibal” de la directive “Hannibal” ?