Aidez-nous à poursuivre notre mission en 2025! Objectif de notre financement participatif: 144'000 chf (150'000 €) - 84.34% atteints

Les “ZFE” préparent-elles l’arrivée d’un pass écologique ?

En France, les "zones à faibles émissions" réduisent la liberté de circuler de la population.

Partager

Depuis le 1er janvier, les “ZFE” ou zones à faibles émissions parfois appelées avec sarcasme “zones à forte exclusion” visent à limiter la circulation des véhicules les plus polluants, selon le classement Crit’Air, dans les grandes agglomérations. Ce système, déjà adopté dans une dizaine de grandes villes en France (dont Lyon, Grenoble, Paris et Montpellier) s’est élargi à une trentaine d’agglomérations.

Un Français sur quatre est désormais concerné par cette mesure, et 20 millions de véhicules seraient à changer selon l’association 40 millions d’automobilistes. Non seulement cela impacte le mode de vie et le budget d’une grande partie de la population, générant un fort mécontentement – en effet, interdire l’entrée des villes (et donc l’accès à des soins, à des écoles, aux commerces, etc.) aux foyers les plus modestes risque de créer une fracture sociale d’une nouvelle ampleur – mais les ZFE, justifiées politiquement par l’argument climat, représentent en réalité une aberration écologique! Pour Pierre Chasseray, représentant de l’association 40 millions d’automobilistes:

L’écologie, ce n’est pas mettre à la casse quelque chose qui fonctionne encore.

Quels critères pour quels véhicules ?

Inscrites dans la loi sur la mobilité en 2019 et renforcées par la loi Climat et résilience en 2021, les ZFE veulent interdire progressivement les véhicules qui ne répondent pas aux critères choisis dans les zones où la circulation est la plus dense. Mais quels sont les véhicules concernés exactement ? Selon la loi française, tous les véhicules devraient s’équiper d’une vignette “Crit’Air” en fonction de leur ancienneté:

  • Crit’Air verte : Véhicules électriques et à hydrogène.
  • Crit’Air 1 : Véhicules gaz et hybrides rechargeables, voitures essence à partir de 2011, motocycles à partir de 2017 et cyclomoteurs à partir de 2018, poids lourds essence à partir de 2014.
  • Crit’Air 2 : Voitures diesel à partir de 2011 et essence de 2006 à 2010, motocycles de 2006 à 2016 et cyclomoteurs de 2006 à 2017, poids lourds diesel à partir de 2014 et essence d’octobre 2009 à 2013.
  • Crit’Air 3 : Voitures diesel de 2006 à 2010 et essence de 1997 à 2005, motocycles et cyclomoteurs de juillet 2004 à 2006, poids lourds diesel d’octobre 2009 à 2013 et essence d’octobre 2001 à septembre 2009.
  • Crit’Air 4 : Voitures diesel de 2001 à 2005, motocycles et cyclomoteurs de juin 2000 à juin 2004, poids lourds diesel d’octobre 2006 à septembre 2009.
  • Crit’Air 5 : Voitures diesel de 1997 à 2000 (pour les véhicules utilitaires légers diesel, d’octobre 1997 à 2000), poids lourds diesel d’octobre 2001 à septembre 2006.
  • Non classés : Voitures diesel et essence jusqu’en 1996 (pour les véhicules utilitaires légers, jusqu’en septembre 1997), motocycles et cyclomoteurs jusqu’en mai 2000, poids lourds diesel et essence jusqu’en septembre 2001.

Où se situent les ZFE ?

En Europe, plus de 320 métropoles ont mis en place des “zones à faibles émissions”. Côté français, les restrictions les plus dures sont appliquées à Paris, Lyon, Grenoble et Montpellier où les véhicules “non classés” et les Crit’Air 5 et 4 étaient déjà exclus avant 2025. À ces véhicules s’ajoutent depuis le 1er janvier l’exclusion des modèles Crit’Air 3 dans ces quatre villes.

Six autres métropoles ont instauré des ZFE à partir du Crit’Air 4 : Marseille-Aix en Provence, Nice, Reims, Strasbourg, Toulouse et Rouen.

La majorité des autres agglomérations françaises de plus de 150’000 habitants applique progressivement les “ZFE-mobilité” en choisissant leurs propres critères locaux, chaque cité faisant ce qu’elle veut. D’autres villes sont exemptées de ZFE comme au Mans ou à Saint-Nazaire où la pollution de l’air est restée sous les seuils définis par l’OMS.

Une illusion écologique

Il existe des élus, y compris parmi les écologistes, qui ne sont pas favorables à la mise en place des ZFE, comme par exemple la métropole de Nantes qui a décidé d’appliquer une version très peu restrictive de la zone à faibles émissions. Tristan Riom, vice-président de Nantes Métropole en charge du climat, expose sur France 3 en 2023:

Les études ont montré que les ZFE ont peu d’impact sur la qualité de l’air.

À Annecy, en Haute-Savoie (74), un habitant de l’agglomération, Raphi Deschamps, a lancé une pétition qui a récolté plus de 4’900 signatures, et a déposé un recours gracieux contre l’arrêté concernant le projet de ZFE-mobilité sur la ville. Il a pris soin d’investiguer tous les documents présentés par la commune lors de la réunion de concertation avec les citoyens:

Les bénéfices attendus par la ZFE sont minimes et devraient être évalués en considérant également les impacts négatifs générés sur les plans économique et social.

Il faut savoir que la pollution de l’air baisse “naturellement” avec le renouvellement automatique du parc automobile. D’autant plus que tous les véhicules sont soumis à un contrôle pollution lors du contrôle technique. Par comparaison, les gains apportés par les restrictions des ZFE sont ridicules et ces gains sont décalés dans le temps. Cela a vraiment peu de sens.

L’objectif déclaré des ZFE est de lutter contre les décès prématurés liés à la pollution de l’air, dont 40’000 décès seraient liés aux particules fines et 7’000 seraient attribués aux oxydes d’azote. Cependant, l’étude effectuée par l’agglomération d’Annecy déclare elle-même que:

La mise en place de la ZFE-m n’a aucun impact sur l’exposition de la population aux particules fines.

La courbe en pointillés gris représente le niveau d’exposition à la pollution de la population en 2022. La courbe jaune correspond au niveau d’exposition à la pollution estimé sans ZFE en 2030, et la courbe bleue au niveau d’exposition à la pollution estimé avec la ZFE en 2030… Il est très difficile d’apercevoir la courbe jaune puisqu’elle est presque parfaitement superposée à la courbe bleue.

À travers le recours gracieux qu’il a déposé, Raphi Deschamps tente, non pas de s’attaquer à la loi directement puisqu’elle ne peut pas être modifiée par ce moyen, mais de minimiser l’impact de l’application locale de cette loi. Plus précisément, il espère qu’un moratoire pour les particuliers aux véhicules non classés puisse être appliqué, afin qu’ils ne soient pas verbalisés, et il souhaite également que soit repoussée l’exclusion des modèles Crit’Air 3, 4 et 5 jusqu’à l’année 2035:

En adressant un recours gracieux à l’agglomération, on peut gagner du temps et nous permettre de faire un recours contentieux auprès du tribunal administratif.

Raphi Deschamps espère aussi obtenir du soutien de la part de la population d’Annecy, en particulier de ceux qui disposent de capacités sur le plan juridique:

La création d’un collectif local ou d’une association serait un atout pour faire ce recours devant le tribunal administratif.

Une mise en place progressive du pass écologique ?

Les restrictions plus ou moins importantes et les dérogations instaurées de façon progressive avec les ZFE par les différentes agglomérations ne sont pas sans rappeler le projet de pass écologique.

Parmi les dérogations autorisées par les communes, il existe par exemple le pass ZFE 24h prévu pour les petits rouleurs qui donne la permission à 24 jours de circulation (à Paris) ou 52 jours (à Rennes et Lyon). À Annecy, l’idée d’un pass pour parcourir 10’000 km a déjà été présenté…

Mandaté par l’ADLF (Association de Défense des Libertés Françaises), l’avocat David Guyon conteste la légalité des ZFE à Montpellier et dénonce:

Les zones de faibles émissions sont des pass écologiques avec une restriction progressive de nos libertés fondamentales pour nous accoutumer aux restrictions.

À l’avenir, il est prévu que les contraventions (68 euros pour les voitures et 135 pour les camions) se durcissent. D’ailleurs des radars ou des caméras à lecture de plaques spécialement équipés devraient se déployer entre 2026 et 2027 pour verbaliser les contrevenants Crit’Air. Indigné, Raphi Deschamps dénonce:

Cela donne vraiment l’impression d’instaurer une société sous contrôle avec une criminalisation du citoyen ordinaire, où une personne qui n’a pas vraiment commis d’infraction est pénalisée pour des raisons idéologiques.

Pour en savoir plus

Le site web de l’association 40 millions d’automobilistes

Le documentaire de l’association “40 millions d’automobilistes” : ZFE : la bombe à retardement sociale – Qui pourra encore rouler demain ?

L’interview de Pierre Chasseray sur Toscin : “Le jour où les radars appliquent les ZFE, ce sera la révolution !”

La vidéo de l’avocat David Guyon : Les ZFE, des zones de forte exclusion ? | David Guyon reçoit l’ADLF

La pétition contre le projet de ZFE-m sur le Grand Annecy

Contact pour s’impliquer contre le projet de ZFE-m sur le Grand Annecy : raphi.deschamps@proton.me