USA: Qui est Jim O’Neill, le n°2 de la Santé et le nouveau directeur du CDC?

Investisseur de la tech et conseiller politique «libertaire» ayant servi sous l’administration Bush, Jim O’Neill est le nouveau directeur par intérim du CDC américain (Centres pour le contrôle et la prévention des maladies). Il remplace Susan Monarez à la tête de l’Institut suite à son renvoi par Kennedy fin août 2025. Monarez et une série d’autres responsables de l’agence s’étaient ouvertement opposés aux changements prônés par Kennedy et les nouveaux experts qu’il a nommés dans les divers comités scientifiques en charge de la vaccination.
De toute évidence, Jim O’Neill semble plus ouvert à une remise en question des intouchables recommandations vaccinales « classiques » et, durant la pandémie, il avait déjà critiqué l’institution à plusieurs reprises. Mais sa désignation est aussi révélatrice de la volonté de propulser le secteur de la santé dans de nouvelles directions: l’innovation technologique (qui pourrait comprendre de nouvelles technologies vaccinales à l’ARNm, la « santé par le numérique », et la lutte contre le bio-terrorisme.
Tout comme la majeure partie du gouvernement Trump, il est un proche de Peter Thiel, l’homme de « la mafia PayPal » et de Palantir, une entreprise qui émane de la CIA et du complexe militaire industriel et qui est au coeur de la centralisation des données de toute la population occidentale.
Plume de propagande
La carrière d’O’Neill dans le secteur de la santé a démarré en 2002 sous le règne de Georges Bush, en tant que chargé de communication du ministère de la santé, où il a notamment conçu la rhétorique liée aux menaces pandémiques (Sars-cov- 1) et aux risques liés aux attaques biologiques après le 11 septembre (les menaces de l’anthrax). O’Neill a immédiatement été impliqué dans les politiques sanitaires mondiales, puisqu’il faisait même partie de la délégation américaine à l’OMS.
De 2005 à 2007, O’Neill est devenu secrétaire adjoint associé et conseiller principal du secrétaire adjoint du HHS (département de la santé et des services sociaux américains), et en novembre 2007, il est devenu secrétaire adjoint associé principal du HHS, en fonction jusqu’en octobre 2008. Il est intervenu dans les politiques de la FDA (l’agence des médicaments), du NIH (l’Institut national de la santé), de l’Agence de recherche et de qualité des soins de santé (AHRQ), du Bureau de la santé publique, de la science et de la santé mondiale et de l’Autorité de recherche et de développement biomédicale avancée (BARDA).
En somme, il semble qu’il ait été étroitement impliqué dans les stratégies de défense militaire et les plans de préparation aux urgences sanitaires, depuis l’administration Bush.
Poulain de Peter Thiel
En 2008, O’Neill se tourne vers le secteur privé – les innovations technologiques de la Silicon Valley – en association étroite avec le milliardaire Peter Thiel. Il est nommé directeur général du fonds spéculatif Clarium Capital de Thiel, et de 2009 à 2012, il est également PDG de la « Fondation Thiel », l’organisation « philanthropique » de son mentor.
À partir de 2012, il rejoint Mithril Capital Management – un fonds d’investissement de capital à risque toujours cofondé par Thiel – en tant que directeur général, où il siège jusqu’en 2019. Le portefeuille dont il s’occupait comprenait des entreprises qui croisaient la technologie, la sécurité et la biotechnologie. Mithril a investi dans Palantir Technologies, la société d’analyse de données qui s’est développée avec des capitaux de la CIA et qui se spécialise dans la concentration et l’analyse des données de la population au service du gouvernement et de la défense. Mithril a également soutenu des entreprises comme Helion Energy (fusion nucléaire), ce qui confirme encore l’implication de Jim O’Neill dans les domaines qui touchent à la sécurité nationale.
Transhumaniste et technocratique convaincu
Partageant les rêves de jeunesse éternelle et la crainte de la mort avec son mentor, Jim O’Neill s’est aussi plongé dans les technologies transhumanistes. Il a été membre du conseil d’administration (et PDG de 2019 à 2021) de la SENS Research Foundation, une organisation à but non lucratif consacrée à la recherche anti-âge fondée par le gérontologue Aubrey de Grey. Il a également dirigé les efforts en médecine régénérative et dans les sciences du prolongement de la vie, et est connu comme un défenseur des thérapies pour « inverser le vieillissement ».
Thiel s’intéresse même à des pratiques de « vampirisme médical » comme par exemple la parabiose (transfusions de sang de jeunes pour les personnes âgées) visant à augmenter la longévité.
O’Neill fait aussi partie du club des initiatives marginales comme les futures « mini-Etats technocratiques ». Il a siégé au conseil d’administration du Seasteading Institute, encore un projet promu par Thiel, qui a été conçu par Patri Friedman (le petit-fils de Milton Friedman) pour créer des cités-États autonomes dans les eaux internationales. Ce mouvement Seasteading aspire à «échapper aux travers de la gouvernance démocratique» et à expérimenter de nouvelles règles de vie sociale sur des cités flottantes. Mais, lorsque l’on y regarde de plus près, ces tendances idéologiques que Jim O’Neill et ses amis de la Silicon Valley revendiquent sous l’appellation de ‘techno-libertarisme’ s’apparentent plus à une forme de régression proche du néo-colonialisme. (voir notre article l’Archipel des technocrates).
Accélération des nouveaux produits de santé
Après l’élection de 2024, Trump a annoncé qu’il nommerait O’Neill au poste de sous-secrétaire à la Santé et aux Services sociaux, agissant comme le bras droit de Kennedy. En tant que secrétaire adjoint, O’Neill est chargé de superviser l’ensemble des opérations du ministère de la santé, allant des programmes d’assurances santé (Médicale/Medicaid) à la recherche biomédicale, la santé numérique ou les urgences sanitaires. En pratique, il est devenu directeur exécutif de la gestion quotidienne des agences telles que le CDC, la FDA, les NIH, etc.
Durant la pandémie, il avait vertement critiqué les recommandations de l’agence, ce qui ne l’avait pas empêché de se déclarer « fortement pro-vaccin » lors de son audition au Sénat pour confirmer sa nomination. Mais, s’il semble adopter les vues de Kennedy sur les risques liés aux vaccins existants, ce n’est peut-être pas sans arrière-pensée.
L’homme est connu pour ses opinions peu orthodoxes sur la réglementation des médicaments. Il a fait valoir à plusieurs reprises que la FDA devrait assouplir ses normes et autoriser la mise sur le marché accélérée des médicaments en ne se contentant que des preuves minimales quant à leur sécurité et leur efficacité. Cette position qui consiste à « approuver d’abord et tester plus tard » pourrait bien orienter les nouvelles politiques de la FDA concernant l’introduction de nouveaux vaccins en général et de « plateformes » à ARNm en particulier. Un discours qui inquiète et qui n’est certainement pas partagé par l’entièreté des partisans de Kennedy et du mouvement MAHA, mais qui rejoint les sponsors du gouvernement Trump et de leur grand projet « Stargate« , annoncé au lendemain de son entrée à la Maison Blanche.
Pour O’Neill, il est important de donner au HHS une nouvelle « puissance d’innovation technologique » (n’était-ce pas déjà le cas avec Fauci?), cette fois grâce à l’utilisation massive de l’IA et la constitution de méga-bases de données recoupant toutes les informations liées à la santé. Tout ceci devant alors permettre de mieux se préparer et de réagir plus rapidement aux futures menaces sur la santé publique – par exemple des pandémies provoquées par des recherche de ‘gain-de fonction » dans des laboratoires ennemis. (Voir l’article Origine du covid: Trump impose la version du virus de laboratoire).
En somme, le profil de Jim O’Neill tranche singulièrement avec celui de Kennedy et il est légitime de se demander s’il n’est pas là pour garantir malgré tout la pérennité de l’alliance entre ce que l’on nomme l’Etat profond et Big Pharma. Car, si les agents de l’infaillibilité vaccinale et des menaces pandémiques « naturelles » sont écartés de la scène, ceux de l’innovation accélérée pour lutter contre des pandémies « fabriquées par des ennemis » pourraient bien prendre le relais et conduire ‘le bon peuple’ à la même destination: une société de contrôle par le Big Data et les technologies transhumanistes.
Tout est possible… Un tel scénario peut très bien échouer, mais il ne faut pas l’ignorer.
Pour l’instant, tout ce que l’on peut espérer c’est que Robert Kennedy Jr parvienne à faire respecter les principes d’éthique et de rigueur scientifique auxquels il est tellement attaché.
Sources:
Sasha Latypova, « Who is Jim O’Neil?« , Due Diligence and Art, 1 sep. 2025.
« Jim O’Neill: Unfit to Be the #2 Health Care Leader in America », Public Citizen.
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