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Kevin Gay des Combes n’est pas un jardinier comme les autres. Il pratique une agriculture dite “syntropique“, c’est à dire fondée sur l’observation et la compréhension de tous les systèmes vivants.
Après une année passée à l’école d’horticulture de Lullier / Genève et 3 années d’apprentissage, Kevin se retrouve avec son CFC (Certificat Fédéral de Capacité) d’horticulture en poche en 2009. Pourtant, ce n’est pas sur les bancs de l’école que Kevin a trouvé le savoir nécessaire à la mise en place de l’agriculture syntropique.
Après ses études, il travaille en tant que maraîcher sur sol vivant. Très rapidement, il lui vient cette conclusion évidente que le maraîchage ne peut se concevoir sans arbres, d’où l’idée de développer la notion de jardin forestier.
Créer de l’abondance
Aujourd’hui, fort d’une expérience de 15 ans de terrain, il peut se targuer d’avoir obtenu des résultats surprenants en multipliant les jardins forestiers, tant pour lui que pour une clientèle faisant appel à ses services.
L’objectif de ce type de jardin, appelé aussi jardin nourricier ou jardin syntropique, est de créer de l’abondance en respectant au mieux les caractéristiques du milieu dans lequel celui-ci sera implanté. Le jardinier multipliera les essences et associera arbres, arbustes et une pléiade de plantes.
Ainsi, dans un espace réduit, peuvent se côtoyer arbres fruitiers, légumes ou encore plantes aromatiques mais aussi des essences dites « sacrificielles » (comme le sureau par exemple), utiles lors des premières années de vie du jardin pour alimenter le sol en matières organiques. Toutes ces plantes, le mycélium des champignons présent dans le sol et même les animaux (insectes, micro-organismes, etc.) agissent ensemble et sont interdépendants : ils créent un système dans lequel des informations s’échangent en permanence.
Communication végétale
“Toute action dans le jardin engendre une réaction : quand je coupe un arbre et que je lui enlève plus de la moitié de sa partie aérienne, l’information qu’il génère c’est “j’ai perdu la quasi totalité de mes branches et de mes feuilles, il faut que je repousse”. En passant par le bouleversement de la taille, on va donner une information de pousse et de croissance (au reste du jardin) et les jours et semaines qui suivent les coupes sévères menées en été ou en automne, on voit que tous les végétaux autour de l’arbre en question explosent en croissance parce qu’ils reçoivent l’information de l’arbre taillé. Et comme tout est relié, tous les végétaux reçoivent cette information”.
Etapes pour créer un jardin syntropique
Pour débuter, il est important de créer dans un premier temps le “design”. C’est le plan qui permet de se faire une projection du futur jardin avec la place de chaque essence. Le design prendra en compte les besoins des usagers du jardin, mais aussi les caractéristiques du terrain (ensoleillement, pente, nature du sol, climat, etc.), ainsi que les caractéristiques des plantes et leur emplacement (plantes d’ombre, plantes de plein soleil, etc.).
Kevin va encore plus loin dans son approche permaculturelle puisqu’il va chercher à recueillir des informations d’ordre énergétiques grâce à une pratique de la géobiologie et de la radiesthésie, notamment lors de la création du design.
L’idée du jardin forestier est d’être rapidement autonome en intrants. Aussi le jardinier sera là pour accompagner et aider au mieux le jardin dans ses premières années. Les résultats se font généralement rapidement sentir au bout de 2 ou 3 ans : les arbres commencent à donner des fruits et produisent de la biomasse réutilisable pour enrichir les sols.
Toutefois, pour que le terrain atteigne sa véritable maturité et qu’il soit résilient, il faut compter environ une dizaine d’année : les intrants (copeaux, paillage, etc.) ne sont alors théoriquement plus nécessaires.
Cultiver en tous lieux
Pour Kevin, il n’y pas vraiment de surface minimale pour créer son jardin forestier ; ainsi, même un citadin peut tenter sur son balcon. Il en veut pour preuves les projets fleurissant dans de nombreuses agglomérations suisses ou européennes :
« Certains projets, à Genève entre autres, se mettent en place pour “reforester” les toitures d’immeubles, avec des jardins partagés, et même des cultures fruitières ! »
D’autant plus que ce type d’agroforesterie doit, selon lui, devenir le modèle à suivre et être associé à une paysannerie raisonnée où cultures céréalières et maraîchage cohabiteraient harmonieusement. Selon Kevin, l’agriculture conventionnelle a fait son temps de par son absurdité, notamment en terme de consommation d’énergie :
« Si on compare ce modèle (agroforesterie syntropique) avec l’agriculture chimique actuelle où il faut de quatre à cinq calories fossiles, la plupart du temps, pour produire une calorie agricole ; si ça n’était pas un modèle lourdement subventionné, c’est une agriculture qui serait à perte ! Elle ne fonctionne pas ! »
Ainsi, si le jardin syntropique est un atout pour gagner en autonomie alimentaire sur le plan individuel, il pourrait l’être aussi à l’échelle d’un pays si des politiques nationales étaient déployées dans ce sens. Pour Kevin, remettre l’arbre au coeur de l’agriculture sera à l’avenir immanquablement la seule façon de faire, notamment pour lutter contre la sécheresse.
Aujourd’hui, Kevin propose des conférences, des visites de jardins afin de transmettre son savoir au plus grand nombre. Il invite tout un chacun à glaner les informations dans les livres, sur le net, auprès de jardiniers mais pour lui, il n’y a pas meilleur professeur que soi-même :
« On est nos meilleurs professeurs, il n’y a pas d’erreurs quand on plante un jardin forêt. Ça peut être aussi ludique et joyeux et les soi-disant erreurs seront nos clés d’apprentissage et de compréhension. Finalement notre propre expérience sera la meilleure pour notre jardin »
Alors, tous à nos bêches !