Elle a ouvert à mi-octobre une enquête sur la plateforme d’Elon Musk, pour la diffusion présumée de “contenus illégaux” et de désinformation au sujet de la guerre entre le Hamas et Israël. La commission examinera la conformité de X / Twitter avec la loi sur les services numériques (Digital Services Act – DSA), ou ‘loi de censure‘ qui vise à réglementer la diffusion des contenus sur les réseaux sociaux.
Selon le communiqué de presse de la Commission, cette demande fait suite à des indications reçues par les services de la Commission concernant la propagation présumée de contenus illicites et d’éléments de désinformation, en particulier la diffusion de contenus à caractère terroriste et violent et de discours haineux. La demande porte également sur le respect d’autres dispositions du DSA.
Thierry Breton attaque
La Commission exige notamment les informations concernant l’activation et le fonctionnement du protocole de réponse aux crises de la plateforme. X a jusqu’au 31 octobre pour fournir les informations demandées et répondre aux questions de l’Union.
“Sur la base de l’évaluation des réponses de la société X, la Commission déterminera les prochaines étapes. Cela pourrait impliquer l’ouverture formelle d’une procédure en vertu de l’article 66 de l’ASD”, a indiqué la Commission qui se dite prête à aller jusqu’à des sanctions pécuniaires.
Cette décision fait suite à la lettre adressée le 10 octobre par Thierry Breton, commissaire européen chargé du marché intérieur, à Elon Musk, propriétaire de X/Twitter, dans laquelle il accusait la plateforme d’être utilisée pour diffuser de la désinformation en Europe.
Breton a exhorté Elon Musk, le propriétaire du réseau social, à répondre dans les 24 heures, le menaçant de procédure judiciaire.
Elon Musk se défend
Suite à cela, Elon Musk a répondu : “Notre politique est que tout soit ‘open source’ et transparent, comme le préconise l’Union européenne. Je vous prie donc d’énumérer les violations auxquelles vous faites allusion sur X, afin que le public puisse en prendre connaissance.”
Dans une lettre datée du 11 octobre, Linda Yaccarino, PDG de X, a déclaré que la plateforme avait supprimé ou étiqueté des dizaines de milliers de contenus depuis que l’organisation terroriste Hamas a lancé son attaque meurtrière contre Israël le 7 octobre. Elle a affirmé que X répondait aux demandes des États membres de l’UE en matière d’application de la loi, et qu’en date de la lettre de M. Breton, elle n’avait reçu aucune notification d’Europol concernant des contenus illégaux.
Peu après l’annonce de l’attaque du Hamas, X a réuni un comité de direction pour évaluer la situation et a redistribué les ressources internes, afin de travailler 24 heures sur 24 à la gestion de cette situation qui évolue rapidement. Yaccarino a déclaré que : “Les organisations terroristes ou les groupes extrémistes violents n’ont pas leur place sur X, et nous continuons à supprimer ces comptes en temps réel”.
50 millions de messages sur X/Twitter
Selon le compte de sécurité de X, la plateforme a connu une augmentation impressionnante du nombre d’utilisateurs actifs depuis l’attaque menée contre Israël, avec plus de 50 millions de messages sur ce seul sujet.
L’entreprise déclare se concentrer sur “la protection de la conversation sur X par l’application des règles” et affirme surveiller activement les discours antisémites. La plateforme a déjà supprimé plusieurs centaines de comptes qui tentaient de manipuler les sujets d’actualité sur son réseau.
Si la lutte contre les discours haineux ou l’antisémitisme est primordiale, la question de ‘la désinformation’ laisse perplexe. Comme on a pu s’en apercevoir ces dernières années, la Commission a aussi la volonté de contrôler le discours politique ou les informations sur la santé ou le climat. Comme le public semble se détourner des grands médias, l’Union et ses membres s’inquiètent. En un an, le nombre de références aux sites des médias traditionnels a été divisé par 6 sur Facebook et par 3 sur Twitter.
Retrouver une information plurielle
Manifestement la confiance est perdue et si le public se tourne vers d’autres sources pour trouver des informations complémentaires, critiques et contradictoires, c’est bien parce qu’elle font défaut dans l’espace médiatique. A quoi se réfère donc précisément Thierry Breton, lorsqu’il parle de ‘désinformation’ sur le conflit ? Peut-on accepter que l’Union européenne contrôle le discours, alors que sa présidente Ursula Von der Leyen exprime d’emblée un soutien inconditionnel à l’un des deux camps ?
Dès l’annonce des attaques surprises du Hamas début octobre, des voix se sont élevées, tant en Israël que dans le reste du monde pour questionner les faits, les enjeux multiples, et la manière dont ils ont été rapportés dans les médias ou au sein des majorités politiques. Les étonnantes failles de sécurité d’une des armées les plus sécurisées et les plus entraînées du monde n’ont pas convaincu tout le monde. De même, toute une partie de la population israélienne semble reprocher à Nethanyaou d’avoir laissé le Hamas se développer au détriment des anciennes autorités palestiniennes et de mouvements plus modérés. Mais tout ceci n’a pas d’écho dans les médias autorisés.
Encore plus significatif, la vidéo de l’essayiste Idriss Aberkane qui s’adresse à toutes les parties – et tente d’analyser la situation en détails pour pacifier les communautés en présence – a été censurée par Youtube. En réaction, Aberkane s’est tourné vers X/Twitter où il a republié son message. Il sera donc intéressant de voir si les services européens en demanderont également à X de la supprimer dans les jours à venir.
L’enjeu de la liberté d’expression reste plus que jamais essentiel dans un contexte aussi difficile. Comme le dit France Soir dans une Tribune pour la paix, la justice et la liberté des peuples : le principal lieu de ces guerres se trouve dans nos esprits.