Dix jours après le début de la campagne de vaccination pour le personnel soignant, à peine 1% a fait le rappel. Des millions de doses risquent à nouveau de passer à la trappe.
Un flop embarrassant et de nombreuses questions en suspens
Lancée le 2 octobre, la campagne d’automne de vaccination contre le Covid-19 a mal commencé dans le Latium en Italie. Avant les personnes âgées et fragiles, elle s’adressait dans une première phase au personnel de santé, exposé parce qu’il “doit protéger les patients”.
Or, dans les dix premiers jours, juste un pour cent du personnel de santé de la région a été (re)vacciné, nous apprend la Repubblica : 426 blouses blanches sur environ 37 000 médecins, infirmières, travailleurs sociaux et de santé des établissements publics.
Pour donner la mesure de cet échec presque cuisant, la vaccination concomitante et simultanée contre la grippe se poursuit en revanche à plein régime : pour chaque vaccin Covid, 38 doses contre la grippe sont administrées, selon les données fournies par la Repubblica, soit environ 44% de ce même corps médical. Ceci est vraisemblablement un indicateur de la perception de l’utilité et du niveau de confiance accordé aux deux types de vaccins.
C’est le 16 octobre que le vaccin Covid sera disponible pour les citoyens âgés de plus de 80 ans et les personnes fragiles. Les autres segments de la population, en particulier les membres de la famille, les cohabitants et les soignants des personnes gravement fragiles, y auront accès dès le 30 octobre.
Des millions de doses mais une faible demande
Les premiers millions de doses du nouveau vaccin adapté aux derniers variants du Covid ont été distribués fin septembre aux régions italiennes.
Selon le rapport du gouvernement du 13 octobre, le nombre de vaccinations effectuées dans toute l’Italie n’a été que de 5’667 au total, alors que le public potentiel pour lequel le vaccin est recommandé, soit les personnes âgées de plus de 60 ans, les personnes fragiles et les travailleurs du secteur de la santé, s’élève à près de 20 millions d’Italiens.
Depuis le début des campagnes en Italie, ce ne sont pas moins de 102 millions de doses au total qui ont dû être jetées, d’une valeur globale estimée à 2 milliards d’euros (à 19 euros pièce), coût de leur élimination non compris.
Ailleurs dans le monde, les autres bonnes affaires des pharmas
Les entreprises pharmaceutiques profitent encore des clauses avantageuses acceptées secrètement par les gouvernements fin 2020 et continuent de réaliser de “fabuleux” bénéfices supplémentaires dans un contexte où la demande est extrêmement faible.
En mai 2021, la Commission européenne avait conclu le plus gros accord de l’histoire pharmaceutique. Après deux premiers accords, en novembre 2020 et février 2021, avec Pfizer/Biontech portant sur l’achat de 600 millions de doses au total, elle a passé une nouvelle commande de 900 millions de doses – avec une option sur 900 millions supplémentaires qui n’a jamais été concrétisée.
Il s’agissait de loin du contrat le plus important de tous les contrats de vaccins de l’UE – et, avec un volume présumé de 35 milliards d’euros, également du plus grand contrat d’achat jamais conclu par la Commission avec un acteur unique du marché, nonobstant les critiques dénonçant une situation illégale de monopole de marché et un non-respect des processus établis.
D’étranges pratiques commerciales
Cette troisième commande de 900 millions d’injections a été l’occasion d’observer un phénomène rare lors de commandes de cette ampleur : le prix par dose du Pfizer est passé de 15,50 à 19,50 euros. Certains ont appelé cela “l’effet Leyen”, du nom de la présidente de la Commission européenne, dont la “disparition” très opportune de ses échanges de SMS avec Albert Bourla, le PDG de Pfizer, n’a pas encore trouvé d’épilogue malgré des appels répétés en Europe et aux États-Unis.
Début 2023, voyant que seules 400 doses de cette dernière commande avaient été écoulées au lieu des 500 millions prévues avant la fin de l’année, une renégociation avait eu lieu avec les fabricants. À l’issue de celle-ci, l’Union européenne a réduit le paquet à 220 millions de doses en payant une amende de 2,2 milliards d’euros. L’achat des 280 millions de doses restantes a été échelonné jusqu’en 2026.
La question qui reste en suspens est de savoir à quel prix, étant donné que Pfizer/BioNtech et Moderna ont annoncé leurs nouveaux tarifs par dose aux Etats-Unis en septembre, suivis par Novavax en octobre : respectivement 120, 129 et 130 dollars. Pour des coûts de production qui restent grosso modo toujours autour de quelques dollars par dose.
Sources